samedi 15 octobre 2016

Rien ne peste, on va tous mourir

Le TGV mène loin de Paris, direction la rochefoucauld via angoulême. Des semaines, des mois parisiens à courir, courir, dessiner, organiser, répondre, courir, encadrer, répondre. Une inauguration d'évènement au Bon Marché , un vernissage d'exposition à la galerie Eko Sato amie, le corps grince un peu, beaucoup.

Direction la charente pour marcher, s'asseoir, regarder inciter.Descente à Angoulême et sa nouvelle gare à grande, grande, grande esplanade, vide et place de parkings en moins. On ne peut qu'admirer ce sens de la poèsie et ce refus du fonctionnel, on ne peut pas déposer quelqu'un à promixité des quais ni le récupérer parce qu'il y a ce grand vide illustrant peut être le désarroi de l'homme moderne, allez savoir...



Le lendemain pause d'une semaine à La Rochefoucauld où j'avais déjà passé une semaine au théâtre des carmes pour une exposition de sérigraphies et des journées marathon de rencontre avec enfants ,adultes handicapés, maison de retraite.

Cette fois là je ne suis qu'à l'hôpital de jour et la maison de retraite ( surtout) et je ne fais "rien", on essaie de faire ensemble à l'occasion de la semaine "bleue" déclinée en noir et blanc. Un rouleau de papier de dix mètres est à disposition pour que chacun puisse y déposer ce qu'il peut, veut surtout puisque chacun viendra expliquer qu'il ne peut pas, qu'il ne sait pas.


Chacun c'est les résidants comme on dit, le personnel de divers niveaux hiérarchiques , des enfants et adolescents qui nous rendent visite, viennent, s'asseoient, repartent.

C'est reposant , fatiguant une semaine ici. Fatiguant parce qu'être tout le temps accompagné c'est différent, reposant parce que de tous ces gens presque aucun ne vient donner de leçons de vie, classer, inventorier, expliquer que le fond de l'air est frais et qu'on prend le thé sans sucre. Juste on dessine, parle, esquive le mur du "je ne sais rien faire" par le constat qu'aucun de nous ne sait vraiment faire, ma tentative de faire de grands personnages à la main levée est d'ailleus un désastre complet alors on fait de petits trucs. Tous en noir et blanc, quand quelqu'un ne voit plus, a la main qui tremble trop où l'envie de bien qui empêche d'oser on pose des silhouettes à compléter, enrichir. On fait.


On fait en parlant, on parle de leurs vies d'ici et d'avant, on regarde des gamines prendre des vieilles dames par la main. On regarde des mains ridées s'appliquer soigneusement à accoucher de dessins d'enfants. On admire l'énergie, l'allant du personnel face aux réticences, à la fatigue et à la mort et la vie qui dansent ici.


Il ne se passe rien cette semaine là, juste des moments qu s'additionnent, des mots, des conseils, comprendre quel est le bon stylo pour une main qui est guidée par des yeux fatigués. Ecouter une voix d'enfant décrire à ceux ci quels traits ils font. Regarder "la chef" une dame à l'allure sévère approcher petit à petit sa chaise de notrre table, laisser fondre son visage sévère, faire les cent pas autour de nous, annoncer que "c'est bien ce qu'on fait" puis s'asseoir "juste pour regarder" et prendre un stylo.


Toutes ces personnes ont un nom mais ma tête aucune mémoire vive, on marche, je me débranche car je sais que je ne retiendrai aucun nom, aucun sigle, aucun itinéraire, aucun rang hiérarchique. Il y a juste beaucoup de gens et presque tous sourient, le sourire est violemment beau quand il vient d'un homme sans jambes qui rayonne plus que celles de certaines femmes de ma viequi les ont si belles. David, je retiens le nom de David parce que cette semaine est l'enfant de David.

David c'est l'animateur socio culturel, celui qui vous donne envie d'une sieste et de sourire à la fois en le regardant vivre , agir cinq minutes. David vole dans ses couloirs avec un air vintage de publicité wonder. Il a un mot d'accompagnement pour chacun , nomme chacun, encourage chacun. Il dynamise, écoute. On va tous mourir, il dit souvent qu'"on va tous mourir" pour souligner que l'on n'a rien d'autre à faire que vivre et il ne le perd pas ce temps. David on ne peut pas oublier son nom, simplement regretter que sa générosité et ses milliers de pas ne soient pas connectés à une dynamo.



Il se passe juste ça, on est juste vivants, juste dans le calme des moments ( il faut pas dire qu'on raconte beaucoup de conneries tout le temps).

Quelques collages à la va vite pour dire merci ici, un petit discours officiel où il est question de ci, ça, tralala et takashi maritano , une grande fresque de papier où tous ces personnages croisés sont de jolis vestiges et puis on s'en va, il ne s'est rien passé, il s'est beaucoup passé.


Merci A Laêtitia du théâtres des carmes et à David Blanchou du centre hospitalier de la rochefoucauld pour l'accueil et à Xavier bOurdereau pour ses jolies photos belles.


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