mardi 6 octobre 2015

Aujourd'hui c'est demain

Parc de belleville dix neuf heures et pas mal de brouettes. Il y a ce type qui marche derrière moi d'un pas tendu et téléphone, il grogne "espèce de connasse!" en regardant le numéro qu'il compose puis crache et il crache tellement sale qu'on sent un crachat dans le crachat. Elle décroche, la voix du cracheur devient miel et velours, il lance "bonsoir ma puce, comment vas tu chérie?".



La dernière exposition, celle qui vit jusqu'au 18 octobre c'est le négatif de ce truc ordinaire qui doit se nommer violence ou duplicité, on s'en fout, c'est pas nous. Il n'y a pas de crachats , il n'y a pas de connasses, il n'y a pas de chéris qu'on méprise avec mes équipages d'un jour ou de long cours.



Avec Emi La



"A demain" c'est le truc que je m'étais dit que je ferais un jour, un des trucs parce qu'heureusement il y en a d'autres et que le temps allonge la liste.

On racontera ce qu'on veut mais tout se construit d'abord tout seul, on saigne, pleure, rit, aime sur du papier, on s'essuie dessus, on l'embrasse, on s'en nourrit mais on est seul avec ça. On se grandit tout seul, on s'aime tout seul et puis après...


                                                                 Gérard Jaulin

Après il y a les rencontres, les partages qui amplifient, donnent plus de sens, développent. Mes pas dans le dessin je les ai fait comme ça, en caressant du papier, seul sous un arbre, en l'épousant petit à petit. Ces pas, je les fais seul à me casser les yeux en paix sur une grande table, à marcher  avec mon chariot et mes tâches de colle sur uniforme noir dans quelques rues.



Seul mais en croisant bien des gens qui comptent , avec qui on partage. Je voulais d'une exposition qui dise merci, qui montre les autres, les associe et qui dise "on continue ". Alors c'est une exposition à invités, il y a celle qui m'a donné envie de dessiner, celui qui m'a encouragé,; mon père à la peinture puissante, mes gentils sérigraphes ultra actifs, mes amies de collages, de dessin, de blabla et tout ça à la maison: galerie ECHOS, Ménilmontant, plus beau quartier de Paris.


Ce n'est pas vraiment une exposition de moi, plutôt une caresse ou un sourire.



                                                                        Avec Seb Cazes

Le partage il s'y incarne , au delà de leur présence sr les murs avec leurs dessins, tableaux, gravures par des dessins à quatre mains. On a dessiné plus ou moins ensemble , par courriers, par rencontres. Petit à petit, j'ai couru chercher çi et ça , leurs travaux à eux, quelques uns de moi puis est venu ce vernissage où ils sont presque tous. Il y a eux dans ce vernissage, leur énergie, la complicité tissée avec ceux qui viennent, des chouettes moments de partage vécus ces derniers temps. Il y a tout ça, c'est lent, c'est doux, c'est calme et il y a du feu dedans.

Bien sur il manque quelques visages ce soir là parce qu'on a tous nos vies, bien sur j'ai envie de dessins avec deux , trois autres mais ça tombe bien...L'exposition elle s'appelle" à demain".







Bisou bisou camarades 

Les photos sont de Martial Denais, les niaiseries de moi, le coup de bambou d'après expo pour ma pomme et ma trogne sont le sceau du bonheur ça secoue et l'exposition se visite du jeudi au samedi de 14 heures à 19 heures au 57 rue des cascades avec le dimanche 18 octobre en extra bal.

Les fautes de frappe sont offertes par la maison.

mercredi 10 septembre 2014

A Tours

Un tour à Tours c'est revenir à la maison, d'occasion, sans les soucis. J'ai commencé à dessiner après avoir rencontré la boutique de Béatrice Myself , rue du grand marché.

Cette fois je viens pour exposer, neuf ans après, rue du grand marché. Parfois revenir au point de départ c'est un peu sabrer le champagne.

Le premier jour soirée chez les David, Béatrice, Sarah luna, Lili et Vladimir. Vladimir m'accueille comme un roi mage, démonstration de camion de pompier, zapping sur ses dessins animés préférés. le lendemain je les accompagne pour sa première rentrée, il la fait en casquette rétro et en courant. Il m'a appelé l'autre jour pour me dire que je pouvais venir "pleins de fois et bientôt". La vie caresse et je ronronne.



Le et les lendemains c'est avec Marjorie, Brice et Mano, on fait aussi sa rentrée, je raconte des histoires, on joue à qui est qui ou un truc comme ça et je prends ma "voix bizarre" héritée de séjours en grèce avec un certain Milo et à Bruxelles .

A part se casser le dos chez les suédois pour ramener des cadres chargé comme un mulet et les disposer tranquillement c'est une semaine à ne rien faire à part vivre, adorer "her", manger des pizzas, amuser des enfants et marcher lent dans une ville familière et inconnue.



Exposer à Tours je le vis comme ça, c'est remettre les pieds en pays d'affection, avec des gens que j'aime bien pour avoir parlé plein de fois cinq minutes. C'est une bulle d'air avec en plus un bel accueil dans une boite noire tenue par Agathe,  blonde souriante, généreuse et pimpante.



La veille je suis réveillé à quatre heures par stromae, sting et quelques autres invités par une sono alors je prends l'air de la nuit, à l'heure où les étudiants titubent et hurlent. Je marche, je marche lent et je sème mes petits poucets qui partiront bien vite, Tours est propre, mais souriront à quelques uns en attendant.

Dans la galerie mes danseurs se posent avec les bustes de "l'amour n'est jamais sale" , avec le couple ensorcelé de "bal et dépendances" sans entassement, sobrement. Dans des cadres j'ai posé les coureurs , mes danseurs, mes échappés, farcis de tendresse, de douleurs avec des masques pour parer à tout. Le vernissage c'est sourire et sourires. Je distribue des cartes à mots aux amis et inconnus pour dire à la fois bienvenue et merci comme d'habitude. 

Dans un coin un dessin à quatre mains avec Béatrice, là aussi il dit merci.




C'est frais comme ça devrait, de l'encre sur du papier et pas de discussions autour de concepts, de clans et de doctrine, j'attendrai Paris pour entendre couper les cheveux en mille.


Lors d'un concert en squatt toulousain de  de kift l'un des musiciens avait annoncé " on ne discutera pas tous mais on s'est rencontrés par le concert, on est amis dans l'esprit". Ca fait du bien de retrouver ça, tout simplement ça. Poser sur des murs, discuter, partager, sourire et une absence totale d'agressivité. ici personne ne vient me dire qu'il faut faire comme çi, ça, ne me démarche pour que je vende des aspirateurs, c'est pas que j'aime la poussière mais ça fait du bien.

Tout ça, tout ces petits moments grands c'est juste une histoire de rencontres, de personnes , d'attraction et de répulsions, d'anges, de généraux, de commerciaux, de cannibales et de sources, rien d'autres, juste ça.

Les mauvaises rencontres on ne devrait même pas en parler, les oublier comme quelques aigreurs d'estomacs et courtes vues.On devrait mais je ne sais pas faire.

Les rencontres cocon, elles, on en parle parce qu'on les garde, on en parle parce qu'on les regarde. On les savoure les heures mièvres ,autour et partout le monde s'haine avec les dents.

Non vraiment, que demande le peuple, quoi de plus que d'être amis dans l'esprit?


Les photos sont honteusement volés à Delphine Parrot Lagarenne et mon texte ici et .






dimanche 29 décembre 2013

Découper

Il n'y a rien de moins accessible que l'immobilisme. Il suffit de rester là, assis, debout, couché mais là , à regarder le temps grossir. la tête cogite, se fustige, les reproches approchent doucement, doucereux, tenaces quant à ce qui pourrait, devrait, se faire. Ce n'est pas confortable, seulement facile, c'est de la fatigue sur place, à portée de néant.


D'accessible il y a aussi le dérisoire, celui qui change tout à base de rien. Il y a une montagne de piles de papier ici, un cadre là bas qui n'attend qu'un clou et un marteau.


Pas loin de la montagne de papier il y a une collection de ciseaux, il reste les petits , parce qu'on les achète par paquets et qu'on ne perd que les grands , ceux qui servent, on les essaime là où on va, chez les quelques autres. Il y a au fil des pas de grands ciseaux perdus qui se rappellent de nous, on leur manque peut être autant qu'ils nous manquent. 



Quand on tend la main vers eux l'immobilisme se fige, il se tait, frémit , il sait déjà qu'il disparait. Le rituel s'entame, l'incantation est simple" juste quelques uns" puis le psaume suivant "encore un" et "encore un" dure jusqu'à ce qu'un tas se forme, qu'il s'étale, engloutisse le sol et le jeune monsieur chat qui m'accompagne avec.

Le tas se forme, les marqueurs alternent avec les ciseaux, la table à dessin avec le sol pour les plus grands, à genoux, le visage collé contre eux comme si on les recouvrait de notre souffle . L'immobilisme est mort un instant, les remarques sont mortes un instant, tu devrais, il faudrait, quo vadis?, "on ne t'aime pas dans le milieu", "tu fais du marketing", "tu devrais peindre", "tu devrais courir nu sur la banquise", "tu es un ingrat" et bla et blablalas. Là on ne dialogue pas avec des pensées pollution, on souffle, on respire, on se tait, on sourie. Le monde peut bruler, il n'est pas invité.



Les ciseaux coupent, détourent et une forêt de personnages de papier se forme, ils regardent, ils entourent. Ils ne crient pas, ils chuchotent, ils sont inexpressifs, ils bercent. Ils sont là.

Ensuite les instruments, passer sous l'eau chaude, nettoyer, préparer la colle, tacher le sol, grogner, sourire, sentir l'impatience monter comme sève et dehors, aller dehors . Il peut faire froid, chaud , mièvre, peu importe, la lumière est allumée.



Les poser au sol, sourire, les caresser contre le mur, caresser le jour, regarder, partir, les laisser derrière, vivants...


On ira voir demain parés de nos plus beaux masques en vérité.




Photos par Anaïs Tille, assistante d'homicide en immobilisme le 28 décembre 2013, featuring un collage de Béatrice Myself de la grande école tourangelle