vendredi 22 mars 2013

Les chevaliers de Métra


Mon petit parcours de dessin c'est une coupure de vingt ans avec un bonheur d'enfant, un verrou d'interdit posé dessus jusqu'à ce qu'il rouille et puis à l'âge du christ le verrou saute comme pour voir dedans si dehors est viable, comme pour flirter avec la vie.

Pas de cours, non, surtout pas de cours, on n'aime pas ça et puis on a pas le temps, on ne l'a pas le temps, on l'a trop eu déjà pour le regarder s'écouler fade dans le sablier. On l'a plus le temps alors on le prend. On achète de gros crayons de couleurs et on recommence avec la technique de ses onze ans. C'est moche et ça fait du bien alors on continue.

Un jour on jette la couleur et on continue, on trouve son personnage de papier, celui qui va parler pour nous, danser, pleurer, aimer, combattre alors on le fait courir. Forcément il court, il court. A l'époque qui aime reçoit un dessin et les dessins se promènent , ils prennent des avions, des bateaux, des trains, ils voyagent, ils voyagent. un jour on se dit qu'ils peuvent aussi voyager ailleurs , autrement pour plus de deux yeux alors on leur propose d'épouser les murs et les murs leur donnent de l'amour.

C'est ça mon histoire en déjà trop de mots. Les gens, les gens qui le suivent ne se ressemblent pas, ils sont beaux ou bossus, riches ou vraiment pas, ils embrassent à droite ou à gauche, ils ont des rhumatismes ou la peste adolescente sur le visage. Ils ne se ressemblent pas ces gens et on les aime pour ça.

Les gens ils poussent un peu, ils deviennent un peu plus nombreux alors ils posent des questions qu'on ne s'était pas posé, ils analysent, ils veulent savoir beaucoup de choses, ils veulent savoir où on veut aller. On ne sait pas, on ne sait pas, on croit juste qu'on est déjà plus loin, au delà des images en tête. On sait qu'on veut dessiner, que les formes grandissent, que des histoires poussent , ça on le sait.

Au milieu des gens viennent ceux des propositions, il y en a de propres et ...les autres aussi. Celles qui parlent de visibilité, celles qui disent que c'est "bien pour toi", celles qui disent qu'on est grand avec l'emphase du ridicule. Celles là de propositions elles commencent mal alors on apprend à s'installer des bouchons dans les oreilles, de gros bouchons comme des armures d'oreilles pour garder les mains fraiches.

Dessiner pour vendre, seulement pour vendre, coller pour la visibilité, seulement pour la visibilité ce serait avoir rendu l'arme , choisi des armes en carton pâte, faire des rêves invisibles , on n'en veut pas de ça. ils disent "vite!" "vite!" nous on pense "vraiment" , "vraiment".

On ne va pas içi , pas là bas, on ne gagne pas tant tout de suite, on ne fait pas de serviettes, de porte clés, de vases en céramiques. Pas parce que c'est pas bien non, juste parce que là , maintenant ça ne nous pousse pas dans le ventre. Ils sont gentils ces gens qui disent "tu dois" mais si "dois", "fais le toi même" comme chantait l'autre.

Par contre on va là , là, partout où les gens sourient, on colle avec un air débile, on s'émerveille soi même, on rencontre des sourires, plein de sourires. On amène ses rouleaux à droite , à gauche, là bas il y a encore d'autres sourires et des mots si beaux que parfois on se demande si ils nous confondent. On nous regarde avec de si jolis yeux que souvent on se retourne pour vérifier si il n'y a personne dans notre dos.

C'est pour ça qu'on est allé là bas. C'est pour ça qu'on a rencontré les chevaliers petits et frais. Là bas...là bas c'est pas loin. Quand Nadia m'a écrit elle n'a pas parlé de visibilité, elle n'a pas dit que je devais marcher sur les mains ou dessiner des anoraks verts parce que c'est tellement beau. Elle m'a dit qui elle était Nadia, elle ne m'a pas parlé comme si j'avais quinze ans, j'ai jamais eu quinze ans.

Nadia elle m'a parlé de me faire un cadeau et c'était un cadeau. Elle m'a proposé de monter là haut, un kilométre plus haut. C'est une école d'içi, dans le vingtième, dans ce quartier que je me suis choisi , dans ce vingtième qui respire la vie et la lenteur et dont les murs m'ont adopté. Là haut , j'y suis allé, j'ai poussé un mini portail, vi des chaises liliputh, je suis entré dans une salle décorée de merveilles qui sent la générosité. Là j'ai rencontré des gosses avec des têtes d'anges, des rires en cascades, des questions pleines de joie.

Ils ont cinq ans, ils ont grandes têtes et petits corps , comme mes personnages , ils sont plus petits que mes collages et quand je pars de là j'ai envie de pleurer et de rire, de dessiner et d'offrir. Qu'est ce qu'on peut recevoir de plus sur un dessin que d'entendre une enfant dire qu'en lui elle voit "de l'amour, qu'elle reçoit de l'amour?".

ils disent merci en plus ils disent merci, ils sont fous ces petits bonhommes.

Oui ça je devais le faire alors...je vous raconterai.... Aujourd'hui on a dessiné un arbre et c'était lui le printemps...

1 commentaire :