dimanche 21 juin 2015

C'est louche un homme qui marche la nuit

Un moment ordinaire n'est pas forcément dérisoire et cette phrase doit êyre réversible. Je n'ai rien fait hier, rien du tout, trois fois rien, un peu de tout. 

Sortie de chez une amie de vingt ans au fils qui en a neuf. Lille pleut, tout est noir,mes rouleaux de papier sont pliés, roulés, abimés, préservés sous mes vétements noirs. Je n'ai plus la force ni vraiment l'espoir que la pluie cesse de réveiller la puanteur du sol. Je marche vers mon toit des derniers jours, je dépasse ce groupe qui crie, cette fille qui parle de sa "putain de belle mère" et de son père qui ne vaut pas mieux.

Heureux soient les putains...

Je rentre et puis bien sur je ne rentre pas, je range toutes les excellentes raisons de rentrer quelque part dans un coin de poche de tête et je bifurque. Je marche vers un mur de pont. Il faut marcher trente minutes ou une heure peut être avec la conviction qu'au bout il y a ce mur de pont qui n'attend pas, qui n'attend rien mais qui sera solidement arrimé au sol.


Je marche, je croise des ombres qui ont des voix, avec ou sans l'accent du nord. La pluie se tait mais pue toujours de l'odeur du  sol et de la ville. Des rues sans rires à traverser, entrée dans un parc. Quand on est biologiquement un homme on peut faire des choses folles pour femmes comme traverser un parc la nuit , parce qu'on est des hommes, elles sont des jambes, des fesses, des cheveux, elles peuvent aussi, mais avec la peur et l'imprudence. On dit qu'elles ont l'imprudence de vivre.

Ici la pluie ne pue pas, elle sent, elle sent l'herbe , la boue, les feuilles et le silence parle avec la voix des branches , de chouettes, des canards dans l'eau qui eux ne disent rien mais sillonnent et je marche lent comme la nuit.

Il n'y a rien et c'est bon qu'il n'y ait rien, je crois que je ne pense à rien non plus, juste à me promener dans le moment et au pont plus loin, je ne siffle pas. 


Je crois qu'on ne marche pas non plus dans ces moments, on roule, on croise quelques fantômes, on s'évite mutuellement pour ne rien perturber du vide confortable, on roule et puis il y a un moment encore plus lent où on arrive. J'ai marché une heure pour ces trois minutes là, pour poser cette dame couronnée qui regarde l'autre rive et lui dit d'aller en paix, juste pour ça. Pas de photo , c'est la nuit et mon téléphone est un pauvre garçon, il ne sait pas photographier comme dans ce siècle, i la juste un coût, c'est pas grave, j'avale l'image dans le souvenir et je lui dis au revoir.

C'est fini déjà, pas fini, c'est fait. Aprés il faut rentrer, la fatigue coule doucement elle aussi et il faut changer de chemin, se perdre un peu , sinon ce n'est pas drôle. Il faut croiser ces voitures, ces rues aux noms de morts, on ne peut pas vraiment se perdre en france, toutes nos rues ont les mêmes noms, ces mêmes morts ,figures héroïques d'années déformées qu'on a achevé en tonsurant des femmes qui n'avaient fait qu'exister.

Je croise un camion de crs stationné prés d'un parc d'où sortent des voix, étrange...Je tends les yeux et il y a là deux petits garçons en uniformes, les jambes écartées autant que faire se peu pour qu'urine glisse, reins en avant qui pissent dans la nuit. L'un d'entre eux me dévisage en essayant d'avoir l'air dur, tu sais cette tête d'inquisiteur body buildé qu'à l'homme en fonctions. Ne pas rire, ne pas rire, ne pas rire alors je serre les dents et j'imagine avoir mon air de dépressif.




C'est louche un homme qui marche la nuit.

Il faut rentrer maintenant, je rentre vers où j'irai un jour peut être. J'aime Paris je crois, j'ose le dire à peine mais j'aime cette ville sale à la population agressive, en compétition perpétuelle, condamnée aux mauvaises manières mais je l'aime. Je crois que j'aime cette mauvaise fée mais elle me chasse , à coups de loyers, de murs humides et d'une pièce sans lumière elle me chasse . Dans ce chez moi de quatre jours il y a des pièces, une baignoire, une cuisine et de la lumière, une terrasse, je vois le ciel, il est bleu et briques. Tu te rends compte? ici je regarde le ciel.

En bas de l'immeuble je colle le visage de celle qui m'a donné des clés et donc ces jours, je crois que je ne suis plus proche de personne d'autre, avec ou sans clés. Peut être seulement que je suis plus proche de ces nuits, de ces jours où on s'appartient ainsi.

 Je suis amoureux de ces moments où la solitude est un manteau soyeux couverts de colle, où l'on s'accroupit sur des trottoirs dégueulasses, où l'on cherche des angles pour amis et où l'on dépose un peu de soi. Je suis amoureux de ça, les mots, la mode, les spots, les "prenons un café", les rudesses parce que je n'exposerai pas là, les comptes à rendre,la vomissure pailletée. Le "milieu" qui m'aura expliqué cent fois en long, en large et en travers que je ne suis pas généreux , que je colle des pixels, que je fais du marketing il fait de la pornographie sans joie avec ma voie.

 Je suis amoureux de ça , de ces pas là et de leur vérité. On peut crever quand on savoure à ce point des moments mais vivre et leur donner des enfants c'est beaucoup plus amusant.

Au matin j'émerge de courtes heures pour polir le lieu, le quitter, entrer dans un train, j'y lis et j'y dors, je pense à des amis de rêves que je rejoindrai bientôt hors du temps et je dors. Je laisse les passagers sortir et je descends sur le quai vide. Pas de métro, je ne tuerai pas le dos vieux dans leurs escaliers avec ma valise pleine. je marche, je descends, je savoure. Je marche comme paris est beau, comme si c'était une nuit et que la lenteur était ma soeur.

Bisous bisous.


J'ai volé certaines de ses photos, je ne sais plus à qui, c'est mal. 


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