dimanche 15 novembre 2015

On ne dira que nous

T'as vu? On a "grandi". On parle de "l'autre fois", on compare, on se souvient d'où on était en Janvier, de comment on était en janvier, on re situe. On se souvient des étapes,on les brule un peu, on se souvient des mots de l'autre fois, c'est pas pour ça qu'on en a de meilleurs mais on se souvient.

On se souvient du vide, on se souvient de devenir mécaniques, de ne plus être bien ou mal comme l'instant d'avant mais en pause. On se souvient des indécences,de fermer les yeux un peu sur les réseaux qui grillent le cerveau à coups de lassots.

On est hagards , encore, on regarde moins les écrans car on sait ce qu'ils diront, on se souvient de l'état dans lequel ils nous ont mis. Hébété on marche quand même , on veut courir, danser, bouger , vivre, quand même et on comprend mieux pourquoi on danse, se marie, rit et baise dans ces ailleurs qui ont le sang et les fins absurdes pour quotidien.



On se parle, on va vers ce qu'on aime comme un réflexe, on ne prend plus le temps d'être à genoux comme l'autre fois. On ne croit pas non plus qu'on s'aimera davantage, qu'on regardera pourquoi on se hait et se bétonne avec des mots , des identités comme des insultes, on n'y croit plus. Cette fois les musulmans semblent laissés en paix, c'est les migrants qui prennent.Tout va plus vite, il n'y a pas de trève cette fois, dès le premier jour on peut entendre grincer des politiques.

On se sent Parisien, ville de merde et de lumière qu'on aime et déteste. 

Moi..Je prends un train au matin que j'ai failli décaler à la veille au soir, que j'aurai pu décaler de jours ou de semaines parce qu'il faut revenir. Il faut être là parce que c'est chez moi. Dans ma rue il y a eu des morts et je n'aime pas ce mot, ce compte. Il n'y a pas , il n'y aura pas cent ou deux cent morts comme des tas de feuilles. Il y a avait des gens, des personnes, c'est ça le truc, il y avait des gens et peu importe que ce n'aient été que des passants et qu'on aurait baillé au bout de cinq minutes avec la plupart d'entre eux.

Photo Arnaud Aussibal (facebook)




Je rentre parce qu'on brule les étapes, je sais qu'il faut vivre et faire, que le dérisoire a plus de prix. Je rentre pour coller des conneries, des fleurs, des anges, mes amours et mes peines qui ne sont plus mes histoires mais celles des autres dès que le papier sort de ma porte. Je rentre pour coller avec la vanité et l'espoir que ce soit mon rôle à jouer. Je poserai mes personnages et ils auront leur sens collé dans le regards, face à l'horreur de monde on peut pleurer,  se détruire, se rogner ou on peut hurler, chanter, rire, bander, aimer, ciseler, que ce soit des monstres, des tâches, des corps ou des fleurs.

Je rentre pour être là, parce que pour une fois je me sens parisien et que peut être à un moment un(e) ami(e) aura besoin de mes bras, de mes silences, d'humour et de mots qui parleront d'autre chose. On ne dira que l'amour. On va vivre, seulement un peu plus fort. On est là parce que qu'est ce qu'on pourrait foutre ailleurs? On n'a pas besoin de courage quand on n'a perdu personne , qu'on n'a rien vu, que son corps est entier,on est seulement un peu différent. On ne peut dire je, on peut seulement penser à nous, peut être qu'on doit.



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